“You need to pay first !” J’ai bien compris malgré les quelques bières descendues un peu plus tôt, on me demande du pognon.
Payer avant de consommer, c’est rare, et pour moi européen, français, ça l’est encore plus lorsque l’on m’annonce le montant : AUS $ 223 ; soit 160 Euros environ. Certes, les salaires sont élevés en Australie – le coût de la vie aussi – mais ce n’est pas tout le temps valable pour les voyageurs payés à coups de lance pierres.
Lorsqu’un saisonnier parvient à bien épargner, c’est qu’il fait beaucoup d’heures et paye très peu de charges : pas de loyer, essence, repas, car il vit sur la propriété avec ses employeurs, par exemple. Bien entendu, il y a des super boulots qui rapportent des gros sous, 800 -1 000 $ par semaine, mais, ça ne court pas les rues.
Cela étant dit, en considérant mes différents petits boulots en Australie, 223 $ correspond, en arrondissant, à 14 heures de travail au taux horaire minimum légal : 16 $ environ, ou à 8 bins d’oranges.
Petite mise en ambiance rapide : ramasser des oranges était mon premier emploi en Australie. Pendant cinq semaines, je conduisais un tracteur avec deux remorques sur lesquelles reposaient six caisses, appelées, bins. Je déplaçais mon tracteur et sa suite au fur et à mesure de mon avancée dans le dépouillement des arbres. Une fois placé comme je veux, je sautais hors du tracteur et me ruais sur les arbres avec mon échelle, remplissant mon sac d’oranges que je vidais ensuite dans les bins. Une caisse pleine pèse entre 350 et 400 kgs, et je touchais 27 $ pour chacune, cela correspond donc à 16 heures de travail environ pour un picker expérimenté, comme lors de mes dernières semaines ; pendant mes premières semaines, huit caisses d’oranges étaient le fruit de 20-25 heures de travail. Payé au rendement sous 35-40 degrés, donc les pauses sont rares et courtes, noyées dans les litres d’eau engloutis.
Ou bien, ça peut-être 8 à 10 heures de travail à ramasser des cerises, qui elles, payent bien. Les salaires varient selon la paye horaire ou au rendement, et selon la qualité des fruits bien entendu. Avec un SMIC en France, il faudrait un peu moins de vingt heures de travail pour gagner ces 223 $.
Bref tout ça pour dire que l’argent ne tombe pas du ciel, et surtout, ne pousse pas sur les arbres, même en Australie.
Mais quid de ces 223 $ ? Vous vous demandez sûrement d’où ils sortent ! Non, ce n’est pas le montant surprise de ma dernière soirée, même si j’étais un peu gris. Devinette compliquée mais pas impossible. Je vous le fais en mille ! En France, la somme aurait été de 23 Euros. Vous avez une idée ?
Une consultation chez le médecin ! Ridicule, non ?! Vous n’allez pas me croire, et pourtant …
Petit patelin touristique, Exmouth et ses 3 000 habitants, dans le Western Australia, n’a pas vraiment de médecin généraliste. Si vous avez un pet de travers, il faut aller aux urgences, qui heureusement ne sont pas aussi bondées que les nôtres. Dans ce mini hôpital, qui n’en est pas vraiment un, on y trouve dentistes, docteurs, et quelques autres services. Si c’est plus grave, il faudra sûrement aller à Perth, la capitale de l’État située seulement à 1500 kms.
Alors pour ce prix là, le tout a duré 2 heures, dont 1h50 à poireauter, pour que le médecin, sûre à 90% de son diagnostique, me prescrive les antibiotiques dont j’avais besoin et me dise qu’elle ne ferait pas les tests sanguins habituels pour éviter que la note ne soit encore plus salée !
Ce docteur qui trouvait cela ridiculement honteux, a eu la bonté de me faire deux ordonnances pour que je puisse renouveler les antibiotiques sans avoir à passer par la case hôpital, et m’a laissé une poignée de pansements supplémentaires, comme en dédommagement.
Je peux retourner à mes occupations, là ou je les avais laissées avant de me rendre à l’hôpital, boire des bières fraîches brassées par Paulie & Joe, couple d’anglais avec qui je fais route, toujours en compagnie de Sally.
C’est l’anniversaire de Joe, et puis, ça fera passer la pilule ; en attendant le remboursement de l’assurance.
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